Tornade

Article / 5 min. de lecture - mise en ligne le 04/10/2022

54% des PME ne se sentent pas prêtes à affronter les effets du changement climatique

Canicules, sécheresse, incendies, inondations… les effets du réchauffement climatique se font chaque année ressentir un peu plus. Les entreprises sont-elles prêtes à affronter les répercussions économiques et sociales liées au changement climatique ? Éclairage avec Goodwill-management.

Goodwill-management, filiale de Baker Tilly, en partenariat avec la MAIF et l’Agence Lucie, publie une étude sur les risques climatiques qui pèsent sur les TPE et les PME. Quels sont ces risques et leurs conséquences ? Quel est le niveau de préparation des entreprises et comment s’adaptent-elles ? Les résultats démontrent un manque considérable de connaissance et de préparation, une situation alarmante pour ces entreprises qui emploient près d’un salarié sur deux en France.

L’été 2022 et ses événements météorologiques sans précédent ont démontré que le niveau actuel de réchauffement à 1,1°C est déjà synonyme de répercussions économiques et sociales importantes. « Les terrasses vidées, les campings incendiés ou encore les travailleurs du BTP, amenés à réaménager leurs horaires ou à repenser leurs équipements de travail, sont quelques-unes des nombreuses conséquences dues aux épisodes estivaux. La dégradation des conditions de travail, de l’environnement, la perte de production ou encore la perturbation des chaînes d’approvisionnement soulignent le besoin urgent de s’adapter aux risques climatiques, pour préserver le tissu économique français », met en garde Arnaud Bergero, Directeur Général de Goodwill-management.

Si certaines grandes entreprises ont déjà déployé des plans et stratégies d’adaptation, ces mesures restent plus marginales pour les TPE et PME, alors que celles-ci concentrent 48,7 % de l’emploi salarié pour 99,8 % des entreprises françaises, selon le ministère de l’Économie.

Un manque de préparation alarmant

Les ressentis des TPE/PME sur leur capacité à appréhender ce bouleversement sont clairs : 82% d’entre elles pensent être un jour affectées par le changement climatique, mais 54% ne s’estiment pas prêtes à en affronter les effets. Dans les faits, les actions d’adaptation déjà mises en place ne semblent pas être suffisamment importantes par rapport à l’ampleur des perturbations à venir. « Et c’est tout à fait normal. La plupart de ces entreprises n’ont ni les connaissances, ni les ressources pour se prévenir de ces risques. Concrètement, une entreprise peut savoir si aujourd’hui elle est sujette à des risques d’inondation, d’incendie ou autre désastre météorologique, via des plateformes comme Géorisques. Mais le risque climatique futur, dans 10, 20 ou 30 ans, n’est pas partagé, même si la data existe. Il est du devoir des instances publiques, de l’ADEME ou des collectivités territoriales, de rendre ces données compréhensibles et accessibles aux entreprises. Une entreprise en 2022 devrait pouvoir être en mesure d’identifier tous les risques climatiques qu’elle encourt, à court, moyen et long terme », alerte Arnaud Bergero.

4 grands risques climatiques pèsent sur les TPE et PME

Le ministère de la Transition Écologique considérait potentiellement six Français sur dix exposés aux risques climatiques en 2016, une proportion susceptible d’augmenter. Avec en premier lieu, l’augmentation des températures et des épisodes de chaleurs, qui causent des pertes de productivité, voire de production. Un tiers des entreprises répondantes s’attendent à une baisse de productivité de leur main d’œuvre. En effet, plus de 860 000 TPE et PME étaient exposées à plus de 50 jours anormalement chauds en 1976-2005, un chiffre qui devrait augmenter à 5,3 millions en 2050, soit six fois plus.

Viennent ensuite les inondations, qui représentent actuellement le premier pôle d’indemnisation au titre des Catastrophes Naturelles (Covéa, 2022). Ainsi, un Français sur quatre et un emploi sur trois sont potentiellement exposés aux inondations, principal risque majeur au titre du nombre de communes concernées et du coût économique des catastrophes (Centre de ressources pour l’adaptation au changement climatique, 2018).

L’augmentation de l’intensité et de la fréquence des sécheresses et canicules aggrave le risque naturel d’apparition d’incendies et de feux de forêts. Les impacts du changement climatique sur les feux de forêts sont multiples : la période d’apparition des feux s’allonge, l’exposition territoriale du risque s’élargit et l’intensité des feux s’accroît, avec l’apparition de méga-feux (I4CE, 2022). Plus de 910 000 TPE et PME étaient exposées à ce risque plus de 50 jours par an (IFM 20) en 2020, elles seront 3,9 millions en 2050, soit 4 fois plus.

Enfin, Météo France estime que le changement climatique induirait des sécheresses du sol extrêmes sur une partie importante du territoire, si bien qu’un été sur 3 serait au moins aussi chaud que celui de 2003 (Géorisques, s.d.). Concrètement, cela signifie que la norme, d’ici 2050-2080, correspondra aux situations de sécheresse extrême actuelles des sols (Sénat, 2019). La démultiplication des épisodes de sécheresse estivaux et hivernaux aura une incidence sur le secteur agricole (pertes agricoles et conséquences sur le bétail), et sur le prix des matières premières.

Des conséquences pouvant paralyser toute activité

Les risques que le changement climatique fait peser sur les entreprises interfèrent avec leur activité, avec en premier lieu une perturbation importante des chaînes d’approvisionnement : faillite de fournisseurs, perturbation des circuits logistiques, diminution de la disponibilité des intrants comme conséquences. À titre d’exemple, une ressource en eau moins disponible peut perturber le fret fluvial ou les opérations de refroidissement d’une entreprise. En 2018, un long épisode de baisse d’étiage du Rhin avait causé une baisse de moitié du trafic fluvial au port de Strasbourg.

Autre risque, la baisse de rentabilité, avec une augmentation des coûts d’approvisionnement, la baisse de productivité de la main-d’œuvre, et des dommages aux infrastructures.

Enfin, le changement de leur modèle d’affaire, contrecoup d’un changement des comportements de la clientèle et des financeurs. « Un exemple particulièrement probant : les économies de montagne qui seront particulièrement impactées, du fait des conséquences directes de la perturbation du cycle de l’eau lié au réchauffement global des températures. La raréfaction de la neige impose aux acteurs du secteur de revoir leur offre, se tournant vers des activités plus estivales. Pour preuve, la descente en VTT est en plein essor », détaille Arnaud Bergero.

La réglementation : le risque de transition le plus redouté

Au global, les risques de transition, qui découlent directement des politiques qui voient et verront le jour afin de garantir une transition vers une économie bas carbone, sont ceux dont les TPE et PME craignent le plus les répercussions. Près de trois quarts des entreprises interrogées s’attendent à des évolutions des contraintes réglementaires et une augmentation de la fiscalité carbone. Une entreprise sur deux s’attend à des impacts sur leurs approvisionnements : aussi bien sur les coûts, que sur les délais, et elles craignent même des ruptures dues à des fournisseurs trop fortement affectés.

Comment certaines TPE et PME agissent déjà pour s’adapter

Afin d’anticiper les risques climatiques, il est essentiel de se former aux enjeux climatiques pour en comprendre les ramifications, et d’analyser les facteurs de vulnérabilités propres à chaque entreprise. En effet, 76% des entreprises sondées n’ont pas connaissance des dispositifs d’accompagnement existants aujourd’hui.

Une fois cet audit réalisé, l’entreprise peut mettre en place des actions concrètes, dont on suivra le déploiement dans le temps pour s’assurer de leur efficacité. Ces actions peuvent à la fois répondre à un besoin de protéger les outils de production et les infrastructures possédées par les TPE et PME et à la nécessité de modifier le modèle économique pour protéger leur activité. En effet, parmi les entreprises interrogées, 39% ont diversifié leurs fournisseurs, 36% ont recherché des alternatives pour leurs intrants et 45% ont noué des partenariats avec d’autres structures de leur territoire.


Méthodologie : Enquête réalisée auprès de 300 entreprises de moins de 250 salariés, par la voie d’un questionnaire en ligne de 20 questions. Les résultats de cette étude reposent sur l’évaluation déclarative des répondants et comportent donc certains biais. En complément de l'enquête, l’étude établie une simulation à horizon 2040-2070 des risques climatiques selon les données de Météo France.

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